Biographie.

Résistants honorés:

Elie de Chaunac de Lanzac




Biographie Son arrestation. Bordeaux Lafayette L'affaire Lespinasse.


Sources: "Mémorial des fusillés de Souge"
Archives familiales de Monsieur Henri de Chaunac
Récit de Claude de Chaunac, fille d'Elie.


La journée du 11 juillet
telle que put la vivre Claude de Chaunac avec sa mère. (suite)

"De la matinée de ce 11 juillet, peu de choses si ce n'est la routine."

"De fait, il était grand, brun, mais là, s'arrêtait la ressemblance. Au bout d'un moment, ils se sont rendus compte de leur erreur et lui ont dit qu'il pouvait partir. J'ai voulu l'accompagner à la porte. Je lui ai demandé d'arrêter un homme, lui ressemblant un peu. Les autres ont entendu et ont hurlé que s'il faisait la moindre chose, ils avaient son adresse et ne manqueraient pas de lui rendre visite. Ne voulant pas d'histoire, il n'a rien fait."

"Pendant ce temps, les questions pleuvaient. Croyant me faire, peut-être, dire quelque chose, celui qui était le chef - en réalité le chef de la Milice de Bordeaux - m'a dit:"

"- Vous savez, mademoiselle, vous coucherez seule ici, j'attends votre père, mais nous prenons votre mère également."

"Je lui ai dit de laisser maman tranquille, que nous étions cinq enfantss et que nous avions besoin d'elle. Ce sale type n'a rien répondu."

"J'ai voulu aller boire un verre d'eau à la cuisine. Un type était toujours derrière moi. Et maman, toujours que l'on interrogeait, toujours de marbre, digne, malheureuse. Et moi, avec la peur... de plus en plus... mais une peur que je ne souhaite à personne."

"Enfin, la grille a grincé et papa est arrivé. Ils nous ont recommandées de ne pas aller à sa rencontre et l'ont attendu derrière la maison."

"- Pas un mot, pas un geste ou bien l'on vous abat l'une et l'autre."

"Ce qui était terrible, c'était de le voir tranquille, confiant et nous, nous ne pouvions rien faire."

"En rentrant dans le salon, ses yeux nous ont fait un signe et nous avons fait non, mais, doucement; ils ne sont rendu compte de rien. Ils avaient leur proie !! Maman était comme pétrifiée. Je me suis jetée dans ses bras, sans pleurer. Je crois que, ce jour-là, je me trouvais dédoublée."

"Le premier moment passé, papa a dû vider ses poches. Ils ont commencé à dire à papa qu'il fallait partir. Alors, là, il s'est passé une chose énorme. Papa a répondu:"

"- D'accord, je vais vous suivre mais, avant, je vais dîner."

"Oui, Henri, il a dîné...! Comment a-t-il fait pour avaler ? Je me le suis toujours demandé, mais nous étions tous ébahis. Il y a de quoi. Calmement, en prenant son temps... Tout en dînant, le chef de la Milice lui faisait des reproches. Papa, sans un mot, continuait son repas. Voyant son calme, le même imbécile lui a dit qu'ils allaient emmener également sa femme. Pas un mot de papa."

"Finalement, cette vermine a ajouté:"

"- Votre femme restera, par respect pour vos enfants." "Toujours le silence. Mais il a ajouté:"

"- Votre fille a une sacrée caboche !"

"Le repas terminé, papa s'est levé!"

"- Je suis prêt, mais pas tout à fait. Il faut que je me change, car, là où je vais, je n'ai pas besoin d'être aussi habillé."

"Bien entendu, il a été suivi dans la chambre avec hommes et revolvers, au cas ou..."

"Sans se presser, toujours avec un sang-froid inouï, le moment redouté est arrivé: les menottes, le départ, atroce, vraiment atroce. Papa m'a embrassée en me disant qu'il nous aimait fort, tous, très fort et que tout irait bien."

"En partant, le même, toujours, nous a dit que vers minuit, il viendrait nous donner des nouvelles. Nous avons attendu toute la nuit. Maman, assise sur son lit, la tête dans ses mains. Nous pleurions toutes les deux, mais papa n'a vu de pleurs ni de l'une, ni de l'autre. Je me suis endormie (Je n'avais que quatorze ans). Maman, toujours dans la même position. Mais, ce regard de maman, ses caresses dans mes cheveux, tout cela faisait mal. Nous avions si peur."

"Ce n'est que vers midi que ce mufle est venu pour nous dire, l'air goguenard:"

"- Votre mari a la tête dure, madame, très dure..."

"On s'imagine facilement le pourquoi d'une telle phrase !"

Madame de Chaunac souhaitait voir son époux. Elle en fit la demande à plusieurs reprises pour s'entendre dire à chaque requête:

- Ah ! non, pas aujourd'hui.


"Jusqu'au moment où, excédée, maman a renversé par terre quelques ravitaillements !! Alors la réponse a été:"

"- Ah ! vous l'avez voulu."

"Ils sont allé chercher papa et, lorsque maman a voulu l'embrasser, il lui a dit:"

"- Ne me touches pas, surtout ne me touches pas."

"C'est la dernière fois que notre pauvre chère maman a vu son mari."

"La suite tu la connais. Vous êtes revenus. La Libération. Chercher papa. Nous savions qu'il était au Fort du Hâ, sans plus. J'ai d'autres détails à te dire. Ont-ils un rapport avec l'arrestation ? Je ne crois pas. Mais je peux te dire une chose, que tu sais déjà, c'est que notre père était un Héros, avec un grand "H" et qu'il me manque terriblement.


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