Il y eut des alertes pour rien, des alertes déclenchées alors qu'aucun avion ne culminait ou
sur des raids réellement destinés à mouiller des mines dans l'estuaire de la Gironde. Mais,
parfois, nous découvrions le ronronnement sourd des bombardiers, suivi très rapidement par les
tirs nourris de la Flak (Défense Anti Aérienne allemande). Nous connaissions les objectifs de
prédilection donnés aux bombardiers alliés: la base aérienne de Mérignac, éloignée de Bordeaux,
mais aussi la base sous-marine de Bacalan, beaucoup plus dangereuse pour la Cité.
Parfois, courbant l'échine, nous percevions le sifflement des bombes avant l'explosion que nous redoutions, mais nous parvenait aussi le crépitement des éclats d'obus retombant sur la ville, particules métalliques aussi tranchantes qu'un rasoir.
Bien sûr, le gouvernement collaborateur rejoignait l'occupant dans l'indignation et l'éreintement systématique et parfaitement orchestré. La radio, la presse, les actualités, tout était bon pour faire monter la colère populaire. L'aviateur anglais et, plus encore, l'américain qui, le plus souvent, culminait à 6.700 mètres d'altitude, étaient représentés comme de vils assassins. Et pourtant, déplorant les morts, les blessés, les handicapés, ils restaient nombreux ceux qui savaient que la libération du territoire ne pouvait se faire sans casse.
De dix ans à treize ans, j'ai vécu cette expérience et je pense ne pas pouvoir faire partager à mes propres petits enfants les sentiments que j'ai pu alors ressentir. Il est difficile de faire percevoir cet impalpable souvenir. Aussi, vais-je proposer le tableau détaillé suivant plus éducatif et qu'il vous sera possible de compléter, dans certains cas, en cliquant, par des fiches annexées:
