J'ai survécu à la "marche de la mort".
Louis Piéchota.

Présentation. Pendant
l'interdiction.
Prisonnier. La vie à
Sachsenhausen.
La "marche
de la mort".
La dernière nuit.

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La Tour de Garde, du 15 novembre 1980.

Les Allemands m'ont transféré au pénitencier de Loos, près de Lille, et, quelques semaines plus tard, à a prison de Saint-Gilles, à Bruxelles.

J'ai été ensuite incarcéré à la citadelle de Huy, près de Liège, avant d'être finalement envoyé dans le camp de concentration de S'Hertogenbosch (ou Vught), aux Pays-Bas. Là, je suis devenu un numéro - le 7045 - et j'ai reçu un uniforme de prisonnier avec le triangle violet qui m'identifiait à un Bibelforscher ou Témoin de jéhovah. On m'a affecté au bloc 17-A.

Il m'a été particulièrement pénible d'apprendre à marcher pieds nus avec de gros sabotd hollandais. Les ampoules laissaient la chair à vif, et, au moindre faux pas, je risquais de recevoir un coup de botte dans les chevilles. Heureusement, la peau de mes pieds a durci et j'ai bientôt pu marcher aussi vite que les autres.

Il y avait 15 autres Témoins dans le camp. On nous proposa à tous une libération immédiate, pourvu que nous acceptions de signer un papier par lequel nous renoncions à notre foi. Mais aucun de nous céda.

Enfin, de ce camp de concentration aux Pays-Bas, on nous envoya en Allemagne. Entassés comme du bétail dans de petits wagons qui transportaient chacun 80 prisonniers, nous avons dû rester debout pendant trois jours et trois nuits, sans manger, sans boire et sans pouvoir nous soulager. Le train arriva finalement à Oranienburg, à une trentaine de kilomètres au nord de Berlin. Nous avons alors dû couvrir au pas de course les dix kilomètres qui nous séparaient des usines d'aviation Heinkel, escortés par les chiens S.S, qui nous mordaient les talons si nous ralentissions l'allure. Avec les autres Témoins, nous nous sommes arrangés pour demeurer ensemble.

Peu après, on nous a transférés au camp voisin de Sachsenhausen. Là le numéro qui accompagnait mon triangle violet était 98227.