Mémoire d'un déporté à Neuengamme.

Entretien avec Pierre Canet


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Photo Pierre Canet

Le 10 mai 1944 c'est le réveil matinal. Après un appel fait dans la cour, de la caserne Boudet, devenue prison, les hommes sont transférés, en autobus, vers la gare Saint-Jean où ils retrouvent d'autres prisonniers venant du fort du Hâ. Par groupes de 36, ils montent dans les wagons dans lesquels, déjà, ils découvrent des barbelés les isolants des sentinelles.

La montée vers Paris sera longue, sous la chaleur avec la soif pour compagne. Changement à la gare du Nord pour Compiègne; arrivée le 11 mai vers 07h00.Ils resteront là dix jours.

Le 21 mai 1944, départ de Compiègne pour le grand voyage vers l'Allemagne, la Déportation... Entassés: environ cent par wagon. Chacun s'est vu attribué 1.200 grammes de pain, une demi boule, et un bout de saucisson. Cela, pour trois jours.

Les wagons étant plombés ils allait attendre plusieurs heures avant que le convoi s'ébranle. Les prisonniers allaient passer cent heures dans ces wagons, toutes ouvertures fermées, un fût dans un coin pour les besoins qui, évidemment, ne tarderait pas à se renverser.

Très rapidement, respirer devenait difficile. Dans un premier temps, un roulement s'instaurait afin que chacun puisse s'asseoir, à tour de rôle. Les choses allaient dégénérer le deuxième jour; ceux qui avaient pu s'asseoir, voire se coucher, ne voulaient plus laisser leur place. Il devenait difficile de respirer; La soif devenait de plus en plus pressante. Elle occultait la faim et rendait impossible d'avaler une seule bouchée. Cinq jours de voyage, un broc d'eau pour tous, malheureusement renversé par un prisonnier ayant perdu la raison.

Le sinistre voyage se terminait le 24 mai 1944, jour d'arrivée à Neuengamme dans les cris, sous les coups de matraque et de pied. Le lendemain: douche, rasage global et distribution des oripeaux qui allaient les vêtir. Spectacle lunaire qui, malgré la détresse de chacun, déclenchait un fou rire général à la stupéfaction des S.S.